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C’était lui, en effet, pâle de colère.

« Que faites-vous là, sergent ? cria-t-il. N’avez-vous pas entendu ce coup de fusil derrière les écuries ? Pourquoi diable le poste est-il dehors ? Et qui s’est permis de donner des ordres en mon absence ?

— C’est moi, dit le capitaine en avançant. Il n’y avait pas de temps à perdre, monsieur, et le sergent ne saurait être blâmé… »

Le lieutenant se calma à l’instant en voyant à qui il avait affaire, et tout le monde revint au poste. Cinq minutes plus tard, le caporal arriva au rapport :

« Un Indien a franchi l’enceinte au numéro 8. La sentinelle a tiré et l’a manqué. »

Sur ces entrefaites, l’adjudant Peyton survint tête nue ; il avait entendu le coup de feu de la salle de bal, et accourait aux informations.

Il n’eut pas plus tôt su de quoi il retournait, que ses soupçons se portèrent sur un Indien bien connu au fort.

« Je parierais que c’est Tatouka qui a fait, le coup, dit-il. Le jour de l’arrivée du détachement, il a été fouetté jusqu’au sang par Hewitt, et il aura voulu se venger…

— Tant que nous n’aurons pas exterminé ces gredins-là jusqu’au dernier, fit observer le lieutenant Graham, nous n’aurons pas là paix.

— C’est facile à dire, mon cher Graham, répondit le capitaine Jim en riant. Mais, comme nous ne pouvons guère cette nuit suivre la trace de Tatouka, le mieux sera, je pense, d’aller prendre des nouvelles de ce pauvre Hewitt… Il peut se vanter d’avoir eu de la chance que je me sois trouvé là pour l’avertir ! Sans moi, il recevait cette flèche dans les reins, au lieu de l’avoir dans le bras.

— Quelque chose me dit que l’automne ne finira pas sans qu’il y ait du grabuge, remarqua l’adjudant Peyton, et je serai fort étonné si ces gaillards-là ne nous donnent pas avant peu du fil à retordre. »

Tout en causant, les officiers étaient arrivés jusqu’au logis du jeune Hewitt, qu’ils trouvèrent entre les mains du docteur Slocum, et déjà pansé.

Ce n’était qu’une égratignure, s’il fallait en croire le digne Tartare, quoique la flèche eût bel et bien traversé le bras de part en part.


CHAPITRE VII
SUR LA PISTE

À travers la plaine sans bornes, parsemée de place en place de taches de chiendent desséché, le détachement de dragons commandé par Cornélius Van Dyck avance en bon ordre vers le nord-ouest.

Un peu en avant de la troupe, on peut remarquer trois guides indiens qui chevauchent à la distance d’environ un mille l’un de l’autre, et de temps à autre disparaissent dans une dépression du sol.

Le détachement est en train de suivre une trace bien connue, celle que le mat de hutte des Indiens en voyage laisse en traînant sur la poussière de la plaine.

Après cinq ou six heures de marche, on est arrivé à une espèce de vallée assez profondément encaissée entre deux murs de terres stratifiées. Ce sont toujours les mêmes alternatives de jaune et de rouge ; mais ici on peut reconnaître en outre de longues tranches horizontales du noir le plus foncé.

« On dirait vraiment de la houille ! fait observer le sous-lieutenant Armstrong, qui