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sauter en selle, ce fut l’œuvre d’un moment. Une fois là, Édouard Warfield se sentit libre.

Les Indiens arrivèrent en criant autour de la butte, la plupart à pied, et sans autres armes que leurs mousquets vides. Quelques-uns, plus prudents, couraient vers leurs chevaux qui paissaient au loin dans la prairie ; mais il leur fallait du temps pour les atteindre. L’avantage était tout pour le fugitif. Il ne craignait point d’être repris. Il n’eut pas même besoin d’exciter son arabe à la course. Celui-ci courait à travers la vallée comme un oiseau porté par le vent, et son cavalier pouvait se moquer du troupeau sauvage qui le poursuivait en criant.


CHAPITRE XV
La fuite. — Dépassé par la poursuite. — La chasseresse sauvage. — Secours inespéré.


Cherchant instinctivement à se rapprocher de la caravane, Édouard Warfield dirigea sa monture vers le cañon situé à l’autre bout de la vallée et dont l’entrée obscure lui promettait une sûre cachette.

Les Indiens étaient à une distance de plus d’un mille ; avant de s’engager dans la gorge étroite, le capitaine put mesurer son avance sur leur petite troupe qui courait à sa poursuite.

Le soleil tomba, et le crépuscule était déjà sombre lorsque le fugitif pénétra dans le cañon. Aussi, se tenant près de la rive de l’Huerfano dont les eaux claires brillaient dans la pénombre, il rendit les rênes à son arabe, se fiant à l’instinct intelligent de ce noble animal. L’arabe suivait le sentier en tenant sa tête baissée, comme un chien de chasse qui flaire une piste.

Lorsqu’il eut parcouru trois milles environ, le fugitif s’aperçut qu’il perdait de sa force. Un frisson traversa tout son corps et glaça son sang dans ses veines. Il éprouvait en même temps une sensation de torpeur semblable à celle que ressentent les hommes à moitié ensevelis sous une couche de neige.

Il pensa que c’était le besoin de sommeil qui causait cet engourdissement. Cela aurait pu être, car il n’avait pas dormi depuis vingt-six heures ; et, afin de se réveiller et de se réchauffer, il voulut marcher un peu.

Il descendit de cheval ; mais à peine eut-il posé ses pieds sur le sol qu’il sentit l’impossibilité où il était de marcher ; ses jambes ne pouvaient pas le soutenir et tremblaient sous lui. Il ne parvenait à rester debout qu’en se tenant à son cheval.

L’arabe tourna la tête vers son maître, comme pour lui demander ce que cela signifiait ; Édouard Warfield essaya de se remettre en selle, mais sans succès, et, après un dernier rayon de connaissance pendant lequel il embrassa le museau humide de son cheval, il tomba en arrière tout à fait évanoui.

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Lorsque le fugitif ouvrit les yeux, il ne vit d’abord qu’un coin bleu du ciel encadré par les masses noires des rochers du cañon. Des étoiles y brillaient. C’était donc encore la nuit. Il sentit courir sur son visage, un air chaud ; c’était son arabe qui était là, à ses côtés, tentant de réchauffer les membres glacés de son maître.

Quoique bien faible encore, le fugitif se sentit capable de se lever. Ce repos lui avait fait du bien ; ses sens étaient nets ; il se souvenait des dangers auxquels il avait échappé et de celui qui le menaçait encore, et il fut assez fort pour monter à cheval, et juste assez pour se tenir en selle.

Il y avait urgence, en effet, à mettre une plus grande distance entre lui et la Main-