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votre compagnie pour ne pas peiner ma sœur en lui rapportant ce dont elle m’avait chargé pour vous. Cette pauvre Katrinka ! elle a eu bien assez de chagrin cette nuit en vous sachant égaré, en vous croyant mort. Que sais-je ? Elle avait les yeux tout rouges ce matin.

— Vraiment ! » s’écria Piet avec une physionomie rayonnante. Quelqu’un qui l’aurait vu ainsi radieux à l’annonce du chagrin de la jeune fille, l’aurait jugé enchanté de la peine de Katrinka ; il l’était, en effet, et, en dépit de son mot reconnaissant à propos de l’attention de sa mère, il trouva d’un meilleur goût que celles de Mme Van Dorn les galettes pétries et confectionnées par Katrina Rynwald.


CHAPITRE XI
NOUVEL OBSTACLE


Après avoir échangé ainsi leurs félicitations réciproques, les trois jeunes gens se disposèrent à retourner au camp, mais pas d’une allure aussi prompte qu’ils l’eussent souhaité.

Hildy, qui avait dépensé toutes ses forces dans sa lutte contre les chiens sauvages, s’était en outre fort mal trouvé de l’averse qu’il avait reçue après sa longue course. Il faisait peine à voir ; ses jambes flageolaient sous lui. Ému de pitié, son maître débarrassa son cheval du poids de sa propre personne et le conduisit par la bride.

« Veux-tu monter à ma place ? et c’est moi qui mènerai Hildy, dit Hendrik à son frère.

— Non, je te remercie, répondit Piet ; maintenant que me voici un peu restauré, je fournirais une marche plus longue que d’ici au camp. »

C’était là un point d’amour-propre chez le jeune chasseur ; puisque son père l’avait traité pour la première fois en homme capable de se tirer d’affaire, il voulait bénéficier de cette bonne opinion en la méritant tout à fait par le refus d’une aide qui cependant ne lui aurait pas été inutile ; mais, toujours par le même motif, Piet n’avait parlé des blessures causées par les épines de l’acacia que comme d’égratignures peu douloureuses ; aussi son frère Hendrik n’insista pas dans l’offre de son cheval.

Le trio d’amis ayant à régler son allure sur celle d’un piéton peu solide, on n’avançait guère. Ce retard les exaspérait tous les trois.

« Quand arriverons-nous de ce train ? murmurait Piet avec mélancolie.

— J’ai bien envie, dit Hendrik, de pousser une pointe en avant par un temps de galop pour rassurer notre monde.

— Oui, oui, » lui répondit Piet.

Là il sacrifiait la joie qu’il aurait eue à voir se dissiper à son approche l’inquiétude qui obscurcissait tant de physionomies amies ; mais il préférait ne pas jouir de ce spectacle et savoir ces êtres chers rassurés une heure plus tôt.

Mais Ludwig arrêta Hendrik en saisissant la bride de sa monture au moment où celui-ci allait la lancer en avant.

« Arrête-toi, dit-il à son ami ; je crois plus prudent que tu ne nous quittes pas. Nous ne sommes pas trop de trois ici pour faire face au danger qui nous menace.

— Un danger, et lequel ? demandèrent Piet et Hendrik également surpris.

— Regardez ! reprit Ludwig en leur montrant une agglomération d’animaux carnassiers qui grouillaient autour des cadavres des buffles tués la veille.

— Cette engeance ! s’écria Hendrik avec le mépris d’un chasseur pour ce qu’en terme de vénerie l’on nomme des bêtes puantes. Tu es bien timide ce matin, Ludwig. Les hyènes et les chacals ne sont pas dangereux. Brûlons-