Page:Reid, À fond de cale, 1868.djvu/75

Cette page n’a pas encore été corrigée

autour de moi, et je pensais qu’en moins d’un quart d’heure j’aurais terminé mon édifice. Mais à peine à la besogne, je m’aperçus de la difficulté de mon entreprise, et je vis qu’elle me demanderait plus de temps que je ne l’avais supposé. Les pierres étaient glissantes, elles m’échappaient des mains ; les unes étaient trop lourdes, les autres, que je croyais libres, étaient à demi enterrées dans le sable d’où je ne pouvais les arracher.

Je n’en travaillai pas moins avec ardeur, appelant à mon aide toute l’énergie dont j’étais susceptible. Avec le temps j’étais bien sûr de réussir ; mais aurais-je celui de terminer mon entreprise ? c’était là toute la question.

La marée montait lentement, mais avec certitude. Le flot s’avançait d’une manière incessante : je le voyais venir, léchant l’écueil, l’inondant de plus en plus, et il ne devait s’arrêter qu’après avoir passé au-dessus de ma tête.

En vain j’essayai d’aller plus vite ; je pouvais à peine me soutenir, j’étais tombé vingt fois ; mes genoux, écorchés par les pierres, étaient sanglants, mais je ne songeais pas à mes blessures ; il s’agissait de perdre ou de conserver la vie, et dans cette lutte avec la mort, j’oubliais la douleur.

Ma pile s’élevait à la hauteur de mon front avant que la marée eût couvert la surface de l’écueil ; mais ce n’était pas assez ; il fallait, pour qu’elle atteignît