Page:Reid, À fond de cale, 1868.djvu/33

Cette page n’a pas encore été corrigée

père dans son prochain voyage, et, toujours habillé en matelot, mon costume était irréprochable ; vareuse de drap bleu, large pantalon du même, cravate de soie noire et collet rabattu. C’était sans doute à la manière dont je portais cet uniforme que j’avais dû mon dernier sobriquet. J’aimais ce nom de petit Loup de mer, qui flattait mon amour-propre ; il me plaisait d’autant plus que c’était Henry Blou qui me l’avait donné le premier.

À cette époque, Henry Blou commençait à prospérer : il avait deux embarcations dont il était propriétaire. La plus grande, qu’il appelait sa yole[1], lui servait lorsqu’il avait trois ou quatre personnes à conduire. Il venait d’acheter l’autre, qui était beaucoup plus petite, et ne la prenait que lorsqu’il n’avait qu’un passager. Dans la saison des bains, où il y a chaque jour des parties de plaisir, la yole était continuellement en réquisition, et le petit canot restait dans la crique où il était amarré. J’avais alors la permission d’en user librement, et de le manœuvrer tout seul, ou d’emmener un camarade si la chose me plaisait. Je ne manquais pas d’en profiter, ainsi que vous le pensez bien. Dès que je sortais de l’école, je me rendais à l’endroit où se trouvait le petit canot, et je me promenais dans le port,

  1. Embarcation légère, allant à la voile et avec des avirons, et qui dans la marine de l’État sert généralement aux officiers supérieurs.