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un vaisseau de telle longueur, de telle profondeur, c’est-à-dire de tel tonnage, et qui, par cela même, devait payer un certain impôt. Mais il ne se borna pas à ces indications ; il demanda qu’on lui fît un navire dont la cale renfermât un chargement d’un tiers plus fort que ne le ferait supposer le tonnage, d’après la mesure adoptée pour établir celui-ci. De cette façon-là, il ne payerait en réalité que les deux tiers de la taxe, et frauderait ainsi le gouvernement dont la loi entravait ses entreprises.

Était-il possible de construire un vaisseau dans ces conditions frauduleuses ? Parfaitement ; il suffisait pour cela d’en augmenter l’étendue, d’en faire saillir les côtés, d’en élargir l’avant, en un mot de lui donner une forme absurde qui en ralentît la marche, et en fît la tombe d’une foule de marins et de passagers.

Le constructeur avait donc le moyen de satisfaire l’armateur ; il obéit aux ordres qui lui étaient donnés, et s’y conforma pendant si longtemps, que finissant pas croire que cette structure ridicule était la véritable forme du navire, il ne voulut plus en changer. Cette conviction déplorable s’était tellement emparée de son esprit, qu’après l’abrogation de la loi qui l’avait fait naître, il fallut de bien longues années pour déraciner cette erreur. Ce n’est que la génération suivante qui put s’apercevoir de la faute de ses devanciers, et rendra aux navires une forme