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repas, et la nécessité de leur en défendre l’accès me rendit mon énergie.

Ils n’avaient pas touché à mes fortifications ; c’était par derrière qu’ils avaient pénétré dans le magasin, en passant sur la caisse d’étoffe que je leur avais ouverte. Il était fort heureux qu’ils eussent rencontré la planche que j’avais mise au fond de la boîte pour empêcher mes vivres de tomber, car sans cela je n’aurais pas retrouvé une miette de biscuits ; mais ce n’était qu’une question de temps : dès que les rats savaient que derrière cette planche il y avait à faire bombance, ils n’avaient pas hésité à la ronger pour en venir aux biscuits, et nul doute que ce ne fût avec la connaissance du contenu de la caisse et l’intention d’en profiter, qu’ils avaient mis tant d’ardeur à pénétrer dans ma cellule, d’où ils pouvaient d’un bond s’installer dans la boîte.

Combien je regrettais de n’avoir pas mieux protégé mon magasin ! J’en avais eu la pensée ; mais je ne me figurais pas que ces maudits rongeurs s’y introduiraient par derrière ; et tant qu’ils n’entraient pas dans ma cabine, je croyais n’avoir rien à craindre de leur voracité.

Il était trop tard pour y songer ; comme tous les regrets, les miens étaient inutiles ; et poussé par l’instinct qui vous porte à prolonger votre existence, en dépit des idées de suicide que vous avez pu concevoir, je rangeai sur la tablette qui était dans ma