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impression, et vous allez le comprendre : les grignotements que j’entendais alors m’arrivaient de la caisse où étaient mes biscuits.

C’est en tremblant que je retirai l’étoffe qui masquait mon garde-manger ; en tremblant de plus en plus que j’étendis les mains pour les plonger dans la boîte.

Miséricorde !… elle était vide !

Pas tout à fait cependant, mes doigts en y fouillant s’étaient posés sur un objet lisse et moelleux qui avait fui tout à coup : c’était un rat ; je retirai ma main prestement. À côté de lui, j’en avais senti un autre, puis un troisième, une tablée tout entière.

Ils s’échappèrent dans toutes les directions ; quelques-uns rebondirent contre ma poitrine, tandis que les autres, se heurtant aux parois de la caisse, poussaient des cris aigus.

Ils furent bientôt dispersés ; mais, hélas ! de toute ma réserve de biscuits, je ne trouvai plus qu’un tas de miettes que les rats étaient en train de faire disparaître lors de mon arrivée.

Cette découverte me foudroya, et je restai quelque temps sans avoir conscience de moi-même.

Les conséquences d’un pareil événement étaient faciles à prévoir : la faim, avec toutes ses horreurs, était en face de moi. Les débris qu’avaient laissés les hideux convives, et qui auraient été dévorés comme le reste, si j’étais venu seulement une heure