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mon impression. L’idée que je pouvais servir de pâture à cette bande vorace me causait une frayeur bien plus grande que celle que j’avais eue d’être noyé au moment de la tempête. Il n’est pas de genre de mort que je n’eusse préféré à celui-là ; rien que d’y songer, mon sang se figeait dans mes veines, et mes cheveux se hérissaient.

Je restai à genoux, dans la position que j’avais prise pour chasser les rats en frappant avec ma jaquette ; et je me demandais vainement ce qu’il me restait à faire. La première chose était de combattre le sommeil, qui aurait été ma perte. Mais comment faire pour rester éveillé ? Je sentais déjà les dents de cette légion infernale pénétrer dans mes chairs ; l’agonie était affreuse, et cependant j’avais de la peine à m’empêcher de dormir.

L’excès de fatigue, l’émotion elle-même, qui épuisait mes forces, m’empêchaient de prolonger la lutte. Mes yeux se fermaient déjà ; et si je m’endormais, ce serait d’un sommeil de plomb. Je pourrais être victime d’un cauchemar qui paralyserait mes membres, et ne me réveiller que lorsqu’il ne serait plus temps.

J’en étais là, souffrant mille tortures de cette effroyable inquiétude, quand une idée bien simple me traversa l’esprit : c’était de replacer ma jaquette à l’entrée du vide par où pénétraient les rats, ce qui fermerait le passage.