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projets d’économie, je devais avoir assez pour vivre, et je n’éprouvai plus d’inquiétude à cet égard.

Je restai plusieurs jours sous l’influence de cette heureuse impression ; et malgré ce qu’il y avait de pénible dans ma captivité, où chaque heure en paraissait vingt-quatre, je supportais assez bien mon nouveau genre de vie. Je passais une partie de mon temps à compter non-seulement les minutes, mais les secondes. Par bonheur, j’avais ma montre, qui me permettait de me livrer à cette occupation, et me tenait compagnie avec son joyeux tic tac. « Jamais elle n’a battu d’aussi bon cœur ; sa voix n’a jamais été si forte, » me disais-je avec surprise. J’avais raison ; ma cellule était sonore, et le bruit du mouvement de la petite machine était doublé par les murailles de bois qui entouraient ma case. Avec quelle sollicitude je la remontais avant qu’elle eût dévidé toute sa chaîne, de peur qu’en s’arrêtant elle ne dérangeât mes comptes ? Ce n’est pas qu’il me fût important de savoir quelle heure il pouvait être. Que le soleil brillât dans toute sa gloire, ou qu’il se fût effacé à l’horizon, je ne m’en apercevais nullement ; la plus mince partie de sa lumière ne pénétrait pas dans mon cachot. Et cependant je savais distinguer la nuit du jour. Cela vous étonne ; vous ne comprenez pas comment j’y arrivais après avoir passé les premiers instants de ma réclusion sans m’occuper des heures. Mais depuis des années, j’avais l’habitude