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mes lèvres se rapprochèrent bientôt de la barrique, et j’y revins à plusieurs reprises avant d’être complétement soulagé.

Il est impossible, même à l’imagination la plus puissante, de se figurer les tortures de la soif ; il faut les avoir ressenties pour s’en faire une idée ; qu’on juge de leur violence par les expédients auxquels ont eu recours ceux qui les ont subies. Et pourtant, malgré cette angoisse indicible, aussitôt qu’on a bu largement, la douleur s’évanouit avec la rapidité d’un songe ; il n’est pas de souffrance comparable qui soit aussi vite guérie.

Ma soif était dissipée, et le bien-être succédait à mon supplice. Toutefois, je n’en perdis pas ma prudence habituelle ; durant les intervalles que j’avais mis entre mes libations, j’avais eu bien soin de fermer l’ouverture de la barrique, en y fourrant le bout de mon index en guise de fausset. Quelque chose me disait de ne pas gaspiller le précieux liquide, et je résolus d’obéir à cette pensée pleine de prudence.

Mais à la longue je me fatiguai de rester ainsi, le doigt passé dans la douelle, et je cherchai un objet qui pût me servir de bouchon. Impossible de rien trouver, pas la moindre baguette, le plus petit morceau de bois dont on pût faire une cheville, J’avais toujours mon index à la futaille, je n’osais pas l’en ôter, et cela paralysait mes recherches.