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quai, et j’étais bien sûr qu’il ne soupçonneraient pas mes intentions. En supposant qu’ils voulussent recommencer leurs railleries, j’en profiterais pour leur répondre, et cela me donnerait le temps de mieux voir ce que je voulais observer.

Je quittai de nouveau ma place, et me promenai çà et là, d’un air d’indifférence. Tout en allant et venant, sans faire la moindre attention à ce qui se passait autour de moi, j’arrivai en face de l’Inca, et m’arrêtai pour en examiner la poupe. L’arrimage devait toucher à sa fin ; car le pont du navire était presque au niveau du quai, preuve que son chargement était à peu près complet. Toutefois la hauteur du plat-bord m’empêchait de distinguer ce qui se passait sur le pont. Je vis néanmoins qu’il me serait facile de gagner les haubans d’artimon, une fois que j’aurais franchi le plat-bord, et c’est à ce moyen que je m’arrêtai, comme celui qui me paraissait le meilleur. À vrai dire, il me faudrait mille précautions pour ne pas faire de bruit en exécutant mon escalade ; j’étais perdu si les ténèbres n’étaient pas assez profondes, ou si j’éveillais l’attention du matelot faisant l’office de sentinelle ; je serais pris, soupçonné, peut-être châtié comme voleur. Mais j’étais résolu à tout risquer, dans l’espoir de réussir.

Un calme profond régnait à bord de l’Inca. Pas une parole, pas l’ombre d’un mouvement ; quelques ballots qui gisaient encore sur le quai, me tirent