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224 CONSTRUCTION OF THE WORLD

exemple de notre appareil optique qui n’est adapté qu’au cas le plus simple mais qui fournit un substitut dans le cas le plus difficile.

Le monde de substitution qui nous entoure est un produit des conditions physiques et historiques dans lesquelles nous sommes placés — un produit de notre situation au milieu du monde physique et à la fin d’un long développement historique depuis la vie primitive jusqu’à notre état actuel. Des conditions analogues sont toujours à l’œuvre et influencent notre vision. Le milieu social dans lequel nous sommes pris ajoute une pression à l’influence plus forte du milieu physique et historique. Nos yeux modernes, familiarisés avec les maisons rectangulaires et les constructions en acier, voient les formes plus riches de la nature dans le cadre de notre style architectural ; les dessins modernes, comparés aux dessins anciens, trahissent cette influence.[1] Au lieu de libérer notre monde immédiat de l’influence de notre milieu, nous l’adaptons à un autre milieu.

Faut-il renoncer à la possibilité de se faire une idée juste du monde ? Je ne le crois pas. Les opérations intellectuelles nous ont montré le moyen de dépasser les limites de nos capacités intuitives subjectives. Il est vrai que ces dernières sont peu influencées par ce processus ; mais au lieu de construire une seule image intuitive du monde, nous apprenons à combiner différentes images de différents niveaux. Chaque image peut, en plus de contenir des traits faux, introduire quelques traits vrais dans la composition. Ce serait peut-être trop demander que d’insister pour inclure toutes les caractéristiques dans une seule image. La perspective du scarabée dans la prairie est meilleure que la nôtre en ce sens qu’elle permet une observation plus précise de

  1. Cf. L. Fleck, Entstehung und Entwicklung einer wissenschaftlichen Tatsache (Bâle, 1935), p. 147, tableau III. Fleck montre des dessins anciens et modernes du squelette humain tirés de manuels médicaux ; il précise que dans les dessins anciens le squelette est toujours un symbole de la mort, alors que dans les dessins modernes il est un symbole des constructions mécaniques-techniques.