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Quant à Crispin , qui est sur le point d’épouser Lisette , malgré la connoissance qu’il a de sa mauvaise conduite, c’est un homme vil, sans délicatesse, et qui compte pour rien les mœurs et la probité.

Bien loin de savoir mauvais gré à Regnard d’avoir ainsi caractérisé ces deux fourbes, nous croyons qu’il y a de l’art d’avoir rassemblé sur ces deux personnages tout ce qui pouvoit les rendre méprisables ; c’est le seul moyen qui puisse excuser l’amusement que donnent leurs friponneries, et qui puisse empêcher que leur exemple ne séduise.

On ne doit jamais se permettre, dans un drame, de faire faire à un personnage vertueux et intéressant une action honteuse qui démente ses principes, et affoiblisse l'intérêt qu’il avoit commencé d’inspirer. On n’a pu souffrir dans un drame moderne l’image d’un fils volant son père; tandis que, dans la comédie de L’Avare, Cléante traverse le théâtre , suivi de son valet qui emporte le trésor de son père Harpagon. Ces deux actions, qui sont exactement les mêmes, ont néanmoins produit des effets bien différents. La dernière fait rire aux dépens du vieil avare qui reçoit la juste punition de sa sordide avarice, et l’autre a généralement révolté.

En voilà assez pour justifier Regnard, et pour