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domestique, et avec qui elle vivoit depuis longtemps avec beaucoup de familiarité. « Pour Crispin (continue le critique anonyme), valet du neveu et amant déclaré de la servante de Géronte, c’est un valet à qui l’on veut donner de l’esprit, et dont on fait le principal intrigant de toute la pièce. Il est déjà veuf, et emploie, le mieux qu’il peut, ses talents et l’expérience que l’âge lui donne, à seconder l’inclination qu’il a d’être fripon ; il jase beaucoup, promet merveilles, se met à tout, et tient le dé dans les grands desseins et les coups d’importance. » C’est effectivement cet intrigant qui est le principal personnage de la pièce, et c’est à lui qu’on reproche aussi d’être un fripon et un homme sans mœurs. Ce reproche ne devroit pas s’adresser particulièrement à Regnard. De tout temps les poètes dramatiques ont mis des intrigants sur la scène, et ces intrigants sont toujours des fripons. Si Molière emploie le secours d’un intrigant pour tromper Pourceaugnac et le contraindre de retourner dans sa province , c’est dans la dernière classe des fripons qu’il choisit son Sbrigani. Voici comme il le peint lui-même : « C’est un homme qui, vingt fois en sa vie, pour servir ses amis, a généreusement affronté les galères, qui, au péril de ses bras et de ses épaules, sait mettre noblement à fin les aventures les plus difficiles, et