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plutôt, est spirituellement posée sur les toits ; si bien que du haut du train, on peut voir ce panorama si rare et si puissamment grotesque d’une ville moderne posée en pleine eau et supportant une voie de fer. Ce spectacle frappe l’esprit comme d’une aberration de la nature elle-même et prédispose à réfléchir sur la puissance de l’homme qui est ici. Tout en lui dénote une énergie extrême, surabondante. Les têtes que j’observe du fond de mon mutisme forcé, ont toutes un éclat vital inconnu en pays français ; on agit ici lentement, avec la volonté vive. Singulière race, puissante et bonhomme, grotesque même, que je comprends et n’aime point, mais je pressens la poésie de ces mœurs casanières et tout ce qui vit sous les fronts taciturnes de ses enfants.



21 Juillet. — Je cours en toute hâte à la peinture et je trouve la vie : en entrant dans cette salle de l’Académie de Harlem, où trois cents têtes vous regardent avec une ardeur si vive, j’ai cru me trouver au milieu d’une foule d’autrefois lorsque Frans Hals vivait lui-même.

Ce peintre extraordinaire a là huit toiles qui le révèlent tout entier, depuis ses débuts jusqu’à sa fin surprenante. Sa maturité vint tard, vers quarante ans, au delà, peut-être, et les œuvres de sa vieillesse sont les surcroîts reçus d’une organisation inouïe qui, pour ainsi dire, ne veut point faiblir. Si jamais le génie prouve que la nature procède par exception pour le génie, c’est bien ici, en présence de ces œuvres suprêmes et dernières, faites avant de mourir et sans décroître sous la main d’un ouvrier de quatre-vingts ans. Il y a là comme la vision de la peinture qui devait naître deux cents ans après lui, par les yeux des réalistes français contemporains, du décadent si vous voulez, du nouveau sans nul doute.

Cette excessive singularité de l’art extrême exhumé si loin de Paris, ce raffinement dans la vision trouvé deux siècles avant nous fait naître la surprise, comme si les lieux et le temps n’existaient