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Comme selon le droit de nature chacun doit naistre franc[1]. Et par aucuns usages ou coustumes, qui de grand ancienneté ont esté entroduites et gardées jusques cy en nostre royaume, et par avanture[2] pour le meffet de leurs prédécesseurs, moult de personnes de nostre commun pueple, soient encheües en lien de servitudes et de diverses conditions, qui moult nous desplait. Nous considérants que nostre royaume est dit, et nommé le royaume des Francs, et voullants que la chose en vérité soit accordant au nom, et que la condition des gents amende de nous en la venuë de nostre nouvel gouvernement.

Par délibération de nostre grant conseil avons Ordené et ordenons.

Que generaument, par tout nostre royaume, de tant comme il peut appartenir à nous, et à nos successeurs, telles servitutes soient ramenées à franchises, et à tous ceus qui de[3] ourine, ou ancienneté, ou de nouvel par mariage, ou par résidence de lieus de serve condition, sont encheües, ou pourroient eschoir ou lien de servitudes, franchise soit donnée bonnes et convenables conditions.

Et pour ce, et spécialement que nostre commun pueple qui par les collecteurs, sergens et autres officians, qui ou temps passé ont esté députez seur le fait des mains-mortes et formariages, ne soient plus grevez, ne domagiez pour ces choses, si comme il ont esté jusques icy, laquelle chose nous desplaist, et pour ce que les autres seigneurs qui ont hommes de corps, preignent exemple à nous, de eux ramener à franchise, nous qui de vostre leauté et approuvée discrétion nous fions tout a plain :

Vous commettons et mandons par la teneur de ces lettres, que vous aliez dans la baillie de Senlis[4], et ès ressors d’icelle, et a tous les lieus, villes, et communautez, et personnes singulières

  1. Pourquoi donc faire acheter à des hommes un droit que la nature leur donne ? Philippe-le-Long publia de nouvelles lettres en 1318, pour le même objet. Les lettres de Louis X n′avaient pas apparemment eu leur effet, soit parla négligence des officiers du Roi, soit parce que les serfs n’avaient point un pécule assez considérable pour acheter leur liberté, ou qu’ils n’osaient pas se fier au gouvernement. (Mably, Obs. sur l’Hist, de Fr., liv. 4, ch. 3, aux preuves), — Louis XVI, par son édit d’août 1779, affranchit, sans finance, les serfs de ses domaines. La servitude n’a été abolie totalement qu’en 1789. (Is.)
  2. Beaumanoir, (chap. 45, des Aveux, p. 254), explique les différentes manières par lesquelles les servitudes se sont establies dans le royaume. (L.)
  3. Origine. (Ibid.)
  4. Il y a des lettres semblables pour les autres baillage. (Ibid.)