Page:Recueil général des anciennes lois françaises, tome 14.djvu/194

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

nostre estat, et retirer les portions et membres d’iceluy, qui ont esté aliénez, vray moyen pour soulager notre peuple tant affligé des calamitez et troubles passez. Et parce que les règles et maximes anciennes de l’union et conservation de nostre domaine, sont à aucuns assez mal, et aux autres peu connuës. Nous avons estimé très-nécessaire de les recueillir et réduire par articles, et iceux confirmer par édict général et irrévocables, afin que ci-après n’en puise douter.

Sçavoir faisons, que de l’avis de nostre très-honorée dame et mère, des princes de nostre sang, officiers principaux de nostre couronne, et autres de nostre conseil ; avons dit, statué et ordonné, disons, statuons et ordonnons ce qui s’ensuit.

(1) Le domaine de nostre couronne ne peut estre aliéné qu’en deux cas seulement, l’un pour apanage des puisnez mâles de la maison de France ; auquel y a retour à nostre couronne par leur deceds sans mâles, en pareil estat et condition qu’était ledit domaine lors de la concession de l’appanage : nonobstant toutes disposition, possession, acte exprès ou taisible fait ou intervenu pendant l’appanage ; l’autre pour l’aliénation à deniers comptans pour la nécessité de la guerre, après lettres patentes pour ce décernées et publiées en nos parlemens, auquel cas y a faculté de rachat perpétuel.

(2) Le domaine de nostre couronne est entendu celui qui est expressément consacré, uni et incorporé à nostre couronne, ou qui a esté tenu et administré par nos receveurs et officiers par l’espace de dix ans, et est entré en ligne de compte.

(3) De pareille nature et condition sont les terres autrefois aliénées et transférées par nos prédécesseurs rois, à la charge de retour à la couronne, en certaines conditions de mâle, ou autres semblables.

(4) Ne pourra nostre domaine estre baillé à ferme ou loüage, sinon au plus offrant et dernier enchérisseur : et ne pourront les fruits des fermes ou louages dudit domaine estre donnés à quelque personne, ne pour quelque cause que ce soit, ou puisse estre :

    après de Henri III, mai 1579 ; de Henri IV, juillet 1607, et de Louis XIII, juin 1611. Le domaine n’est devenu aliénable qu’en 1789. V. la loi du 22 novembre 1790 et celle du 12 mars 1820. — Le domaine était essentiellement inaliénable dans l’ancienne monarchie, parce que l’autorité royale qui réunissait alors tous les pouvoirs pouvait être surprise. Si les rois n’eussent pas eu la faculté de révoquer les aliénations de leur domaine, ils se seraient trouvés sans revenus.