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Mais, tandis que ma muse, au sein d’un doux loisir,
De ces nobles malheurs redit le souvenir,
Et cherche du génie à sentir l’influence,
Combien d’heures ont fui !… Déjà la nuit s’avance ;
le premier chant du coq et les sons de l’airain
M’annoncent que du jour le retour est prochain.
De ma lampe épuisée a pâli la lumière ;
Le silence s’accroît parmi la ville entière ;
Et des chars qui troublaient le calme de la nuit
J’entends dans le lointain finir le dernier bruit.
Tel, parmi des forêts, la flottante verdure,
De l’aquilon rapide on entend le murmure
Sur les rameaux mouvants légèrement frémir,
Se prolonger au loin, fuir encore et mourir.
Heureux de mon travail, dans cette paix profonde,
Partageons un repos goûté par tout le monde.
Je vais donc vous quitter, mes livres favoris :
Adieu, mes compagnons, mes fidèles amis ;
Bientôt je reviendrai, continuant mes veilles,
Relire avec transport vos sublimes merveilles.
Dans mon sommeil encor peut-être qu’à mes yeux
Un songe va montrer vos poëtes fameux ;
Je vais peut-être encor m’élancer au Parnasse,
Aux festins de Tibur m’asseoir auprès d’Horace ;
Je vais encore, au fond d’une obscure prison,
Murmurer les regrets du chantre de Bouillon ;
Ma muse va rêver un élan pindarique ;
Et mon sommeil encor sera tout poétique.