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habiles bateliers.

des mouvements lourds et lents, une attitude empruntée, une démarche des plus gauches, mais de l’adresse et de l’activité. Ils font preuve d’une étonnante habileté à conduire par la plus mauvaise mer leurs kayaks et oumiaks, dont on fait usage jusqu’en Californie, et leurs périlleuses baïdarkas[1] dont les Russes ont porté le modèle en Europe. Wiljaminof, les comparant à des cavaliers dont les jambes s’arquent aussi à chevaucher constamment, les appelait « Cosaques de la mer, monteurs de cavales marines ». Pour que cet homme se montre à son avantage, il faut le voir manœuvrant le batelet de cuir qu’il a fabriqué lui-même[2], et brandissant le harpon dans les eaux agitées. Dès la plus tendre enfance il s’est familiarisé avec l’élément humide. Le Bédouin roule son nouveau-né dans le sable et l’expose au grand soleil, pour l’accoutumer à la chaleur[3] ; l’Aléoutinet, s’il lui prend fantaisie de vagir ou criailler, est à l’instant plongé à l’eau, fût-ce entre des glaçons. À ce régime, on ne garde qu’enfants sages, tranquilles et robustes, les plus faibles ne tardent pas à disparaître.

Les Aléouts se partagent en deux groupes, identiques de port, de mœurs et de caractère, mais quelque peu différents par le dialecte : les tribus qui habitent Atcha, Ounalaska, les Terres des Rats, des Renards et autres au sud de la presqu’île, puis les Koniagas, les Kadiaks et gens d’alentour. Et, sur le continent, les Koloutches de Sitka, les Kénès, Tcherguetches, Médovtsènes et Malégnioutes, ressemblant fort aux uns et aux autres. À tous,

  1. Baydar, bidarra, bidarka.
  2. Kittlitz.
  3. Rampendahl, Deutsche Rundschau, VI.