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rits funéraires.

renne, qu’on présume servir à festins dans l’autre monde. Si le défunt appartient au vulgaire, on l’enterre purement et simplement, et les « affligés » se feront un devoir de manger à son intention le renne, dont ils briseront les os… Pourquoi ? Probablement pour que l’animal ne renaisse pas sur terre et reste propriété du mort dans l’Hadès tchouktche.

Quand des mœurs pareilles se sont perpétuées chez un peuple hardi, tant soit peu guerrier et pirate, les hommes tiendront à honneur de mourir sur le champ de bataille. Au besoin, ils prétexteront des duels pour se faire expédier par leurs intimes, à la façon des Scandinaves. Ils diront, comme les anciens Hellènes : Qui meurt jeune est aimé des dieux.

Les rits funéraires sont moins uniformes que toutes autres coutumes. La majeure partie des Esquimaux ensevelissent leurs cadavres sous un amas de pierres ou dans des crevasses de rochers ; des Groenlandais et Labradoriens les jettent à la mer ; leurs congénères d’Asie les brûlent, les enterrent ou les font manger aux bêtes. Chacun estime sa manière la meilleure. Mais il est de croyance générale que la mort n’est pas le terme de l’existence. Que les défunts exercent sur les vivants une action variée et généralement funeste. Qu’ils sont méchants pour la plupart, au moins à l’état de revenants. Qu’ils passent leur temps à souffrir le froid et la faim. On s’abstient autant que possible d’approcher leurs demeures, surtout si elles sont occupées depuis peu ; mais le passant pieux dépose sur les tombes au moins une miette de nourriture. À la grande cérémonie d’adieu, les amis et connaissances apportent de la viande, dont chacun coupe deux morceaux, un pour lui, un autre pour le mort ; ils tailladent une couverture : —