loppée chez nous. Voyez donc l’embarras d’un honnête apôtre exposant la doctrine de la Résurrection, dans une langue où l’idée d’âme n’a d’autre équivalent que le mot « boyau » ! Pour faire comprendre à ces sauvages qu’ils possèdent une « âme immortelle », il était obligé d’expliquer qu’ils ont dans le ventre une « tripe qui ne pourrit pas ». — Il les faisait compter jusqu’à dix, mais ne pouvait leur inculquer le dogme de la Trinité. Comment les révérends pères auraient-ils traduit, dans une langue où le verbe être n’existe pas, la célèbre définition de l’Éternel Jéhovah : « Je suis Celui qui suis » ?
Les Peaux-Rouges ne parlent que fort peu, et moins que tous autres les Apaches, qui préfèrent s’exprimer par gestes. On en a observé qui, accroupis autour du feu, entretenaient une longue conversation dans laquelle ils ne faisaient que remuer les lèvres[1] ; méthode que nous venons d’adopter pour renseignement des sourds-muets. La langue apache abonde en sons nasaux et gutturaux, en claquements de langue[2], que les étrangers ne parviennent pas toujours à imiter ; l’idiome est décidément désagréable, et cependant les Mohaves, voisins immédiats, ont un parler doux et sonore, harmonieux autant que l’italien ou le japonais[3]. — Notons en passant l’absence de toute salutation, de toute formule de bienvenue ou d’adieu[4].
Puisque la moralité, au moins dans ses lignes générales, se mesure au développement de l’intelligence, on ne s’étonnera pas de la trouver réduite ici à ses rudiments. Ces