Page:Reclus - Les Primitifs.djvu/122

Cette page n’a pas encore été corrigée
102
les inoïts occidentaux.

L’inculpé inoït qui ne se sent pas soutenu par une bonne cause demande, avant la rencontre, à se réconcilier avec son adversaire, auquel il dépêche un ambassadeur vêtu de neuf, en flanelle rouge, avec un bâton décoré de plumes, signe du héraut, pour demander quelle réparation il exige. Quelle qu’elle soit, l’offenseur se fait un point d’honneur d’offrir davantage. — « Tu n’avais demandé qu’un paquet de tabac ; le voici. Tiens, ce pelu, puis cette couverture, et encore cette peau de phoque » ; toutes choses que l’autre n’accepte que pour les distribuer aux témoins de la réconciliation. Les nouveaux amis échangent leurs vêtements, se prennent par la main, ouvrent une danse à laquelle se mêlera le monde.

Tous les Hyperboréens, cependant, ne passent pas leur colère en chansons, n’exhalent pas leur mauvaise humeur en vers et sauteries : alors, plus de lutte poétique, mais un duel vulgaire ; plus de troubadours, rien que de simples chevaliers. Ainsi les Thlinkets et Koloches purgent leurs querelles en combat singulier ; ils se rembourrent d’épaisses toisons ursines, calfeutrées de mousse par surcroît ; s’enveloppent d’une cuirasse fabriquée avec de petites bûchettes reliées ensemble ; se coiffent d’un casque en bois sur lequel ils ont adapté le blason familial. Ainsi accoutrés, ils luttent longuement à coups de couteau, et pour plus de solennité, les seconds accompagnent la passe d’armes d’une sorte de cantilène. Moins grandioses sont les tournois à coups de poing : les champions sont assis, se faisant face ; l’un frappe, l’autre riposte, mettant une minute entre chaque coup, de manière à le savourer, et à jouir de tout son effet ; ils prennent bien leur temps, montrant ce que les Esquimaux ont de patience et d’endurance. Cela dure jusqu’à ce qu’un des combattants se