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les inoïts occidentaux.

doctrine professée par les populations de l’Asie et de l’Amérique septentrionales ; il a été développé dans la suite des temps avec une rigueur surprenante, si bien que l’institution des poulik, des angakout[1], et jossakids, forme, avec les doctrines et traditions qui l’accompagnent, le lien moral des tribus éparpillées sur cet immense territoire.

Tout le monde n’est pas apte au saint ministère ; pour devenir angakok il faut une vocation bien déterminée, de plus, un caractère et un tempérament que n’a pas tout le monde. Les prêtres en fonctions ne recrutent point leurs élèves au hasard ; ils les choisissent de bonne heure, garçons ou filles, ne s’arrêtant pas au sexe ; plus intelligents en cela que la plupart des autres sacerdoces. On en a vu qui s’adressaient à des époux particulièrement qualifiés, leur demandant un sujet d’élite, à former, même avant sa naissance, par une éducation appropriée et un entraînement spécial. Le père et la mère du futur sorcier jeûneront souvent et longtemps, rechercheront certaines viandes, en éviteront d’autres, supplieront les ancêtres d’envelopper le précieux rejeton de toute leur sollicitude. Sitôt née, la petite créature sera aspergée d’urine, de manière à l’imprégner de son odeur caractéristique, — c’est décidément leur eau bénite. Ailleurs, la barbe, la chevelure, l’entière personne des rois et sacrificateurs sont ointes d’huiles prises dans de saintes ampoules ; ailleurs, elles sont beurrées et barbouillées de bouse soigneusement étendue. Chacun son goût. On requiert que le petit ne soit pas comme tout le monde, que par ses gestes et sa démarche, il s’annonce comme étant pétri d’une autre pâte que le commun des mortels ; car il

  1. Angakok, sorcier, pluriel Angakout.