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ASSOCIATIONS OUVRIÈRES DANS LA GRANDE-BRETAGNE.

les budgets dits normaux, de la guerre et de la marine, une bagatelle, comme chacun sait ; une longue série de millions et de centaines de millions, aboutissant à des milliards. Ah ! comme l’on gaspille l’argent dans notre pauvre monde !


Un mauvais arrangement est, on le sait, préférable à un bon procès, et la plus coûteuse des paix revient encore meilleur marché qu’une guerre triomphante. Quelques calculs montreront jusqu’à quel point la passion peut aveugler employeurs et employés, lorsqu’ils commencent par se battre pour faire la paix ensuite, et qu’ils remettent au noble jeu de Qui perd gagne de prononcer sur leurs différends.

En temps de crise, les patrons réduisent le nombre de leurs travailleurs. La fabrication manquant de débouchés, une quantité d’ouvrage restreinte et un salaire encore plus restreint, sont distribués en un plus grand nombre de mains. Par contre, les ouvriers désireux de faire augmenter leurs salaires, choisissent le moment où les commandes abondent pour réclamer un surplus de paye. Si le manufacturier ne veut pas s’y prêter, il s’expose à une grève, au moment où il aurait pu espérer les plus gros bénéfices ; il risque de laisser inactifs ses capitaux de premier établissement, et son fonds de roulement, empruntés peut-être à d’onéreux intérêts. Des grèves se sont organisées pour des augmentations de salaire variant de 2 ½ à 15 %. Supposons, pour rester dans la généralité des cas, qu’il s’agisse d’une demande en augmentation de salaire de 5 %. Les deux parties intéressées ne pouvant pas parvenir à s’entendre, en appellent aux hasards de la lutte. Voyons les conditions qui sont faites aux deux ennemis.

Les ouvriers réclamant une augmentation de 5 % sur leurs salaires supposés de 
 fr. 975»
prétendent se faire payer 
 1 023,75
Pour obtenir par mois 
 85,31
au lieu de 
 81,25
comme ci-devant, ils se mettent en grève, et ils jettent 31 Tu les tiens, pour 85 Tu tes auras, peut-être !

Nous supposons que la grève dure un mois seulement. Nous la supposons victorieuse. Dans ce cas, les ouvriers, pour regagner seulement les 81 fr. 25 c. sacrifiés, devront travailler au tarif amélioré de 5 %, pendant vingt mois. Une grève de deux mois leur coûterait le travail de quarante mois, et ainsi de suite.

Nous concluons, comme s’il ne s’agissait que d’une simple loterie, que l’ouvrier qui fait grève pour obtenir une augmentation de 5 % sur ses salaires, a une fois raison et vingt fois tort. Il aurait une fois raison et dix fois tort, s’il s’agissait d’une augmentation de 10 % ; il aurait une fois raison et quarante fois tort, s’il se mettait en grève pour une augmenta-