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journal de la commune

obscure, n’ont saisi notre drapeau que pour le planter au milieu d’une absurde bagarre… C’est possible ! mais ces gens de Versailles sont ignominieux ; — la puanteur qu’ils exhalent est telle qu’on ne saurait les fuir assez loin, et le plus loin qu’on puisse les fuir, c’est en se réfugiant au milieu du camp de la Commune. Et quoi qu’on craigne, il est impossible d’empêcher les honnêtes gens de se réclamer de principes honnêtes, qu’ils compromettent par leur maladresse. La justice et la vérité sont le bien de tous, quoi qu’en disent les Parisiens qui n’en veulent pas pour les employés de l’octroi, quoi qu’en disent les libéraux qui n’en veulent pas pour la vile multitude. Et les révolutionnaires sont-ils fondés à se plaindre que le programme de la Révolution soit assez profondément ancré dans l’âme du peuple pour que les plus ignorants le proclament, pour que les plus gauches se proposent de le réaliser et en fassent immédiatement le but et la raison de leur conduite ? D’instinct, dès que le drapeau rouge a été arboré au-dessus de l’Hôtel-de-Ville, le peuple a dit : « La Commune déteste les calotins et les calotins détestent la Commune. »

Ah ! si pour la servir, la Révolution n’avait pas de gâcheurs et de tristepattes, pas de gâte-sauce et pas de gâte-métier, si elle n’avait pour soldats que des héros comme Hoche, Marceau, La Tour d’Auvergne, que des citoyens sincères comme Romme et Saint-Just, si elle n’était servie que par des diplomates et des hommes d’État de premier ordre, il y aurait peu de mérite vraiment à être révolutionnaire ! Il serait par trop commode de ne poser devant l’admiration de l’histoire qu’entre Washington et Lafayette victorieux, trop commode de ne partir en guerre que dans l’omnibus des libéraux avec les d’Haussonville, les ducs et princes de Broglie, M de Pressensé, pasteur, M. Loyson, dit Père Hyacinthe, Bathie, le gros louche, M. Léon Say, M. Pape Carpentier, la rédaction complète du Temps, toute la coterie du Journal des Débats, M. Renan gras et doucereux, M. le professeur Ad. Frank, de l’Institut, kabbaliste devant donner le signal de la bataille. Les événements n’attendent point la convenance des partis, ils attendent encore moins que les chefs aient eu le loisir d’endosser la cuirasse, de monter leur coursier, de coiffer le casque panaché et de faire blanc de leur épée. La campagne est