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journal de la commune

un — remporte encore sur Paris — c’en est fait de la France encore pour longtemps. Le régime de la bourgeoisie, c’est la prédominance du capital sur le travail, de l’instrument sur l’ouvrier, de la matière sur l’intelligence, c’est par conséquent l’hypocrisie, l’exploitation, la débauche et le crime, — et après le crime, l’orgueil, la folie, la ruine et l’écrasement. La France est en mal d’enfant depuis sa première révolution, elle doit accoucher de la formule de l’organisation démocratique et sociale ou elle doit périr. Que d’avortements déjà ! Un tous les quinze ou vingt ans, et chaque fois sa vie est en danger. On vient de l’amputer de l’Alsace et de la Lorraine, c’est ce que lui a coûté la grande victoire du Bonapartisme et de la bourgeoisie, des Falloux, Morny, Thiers, Dupin. Si la bourgeoisie triomphe encore dans un nouveau Coup d’État pour lequel se seront fusionnés tous les jésuites et tous les libéraux, tous les bonapartistes parlementaires et républicains bleus, la France sera-t-elle amputée cette fois de ses mamelles, de ses yeux ou du cœur dans sa poitrine ? Chaque victoire de la réaction, la France la paie du plus pur de son sang. Schylock se tient à son côté avec son couteau et ses balances : il me faut tant de pintes de sang, tant d’onces de chair vivante !

Samedi 20 mai.

La question des otages à exécuter est posée maintenant avec une terrible netteté, avec une affreuse insistance. Après les exécutions des lignards, qui n’ont jamais discontinué, après celles des gardes nationaux qui recommencent, après le viol et l’assassinat partout racontés d’une ambulancière du 105e bataillon, après l’explosion des poudrières et le cataclysme du Gros Caillou, la population demande des représailles. Le Rappel publie à ce sujet un premier-Paris tout effrayé. Le Salut Public prétend qu’à la Commune, Amouroux a demandé qu’on fusille des otages, « en commençant par les prêtres, puisque c’est d’eux que vient tout le mal ». Il y a un mois, M. Thiers n’a pas consenti à faire relâcher Monseigneur Darboy et consorts, confiant que la Commune n’oserait pas exécuter ses menaces à leur endroit. Monsieur Thiers vient encore de refuser l’échange