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journal de la commune

Mais ce sont là des récits communeux. Voici une note envoyée de Versailles à l’Indépendance Belge… « Quant à l’état des esprits, il est toujours d’une incroyable excitation. Certes nous aurions toutes les violences à craindre du parti de la Commune. Mais nous avons aussi toutes les représailles à redouter du parti de l’Ordre. Je n’entends que gens parlant de fusiller par ci, de déporter par là, de tels ou tels corps d’armée qui ne font pas de prisonniers. Des officiers se vantaient hier d’avoir fait jeter à la Seine des insurgés blessés… »

Relisons :

… « Des officiers se vantaient hier d’avoir fait jeter dans la Seine des insurgés blessés… »

Lundi, 15 mai.

Avant-hier 13 mai, M. Jules Favre est venu présenter à la Chambre le traité de paix avec la Prusse que la France doit à ses soins ainsi qu’à ceux de M. de Bismarck.

Nous étudierons plus à loisir les modifications introduites, nous contemplerons dans ses détails ce monument de notre honte, de notre ineptie, de nos crimes et de notre immoralité, mais il faut aujourd’hui que notre esprit, rempli de dégoût, se nettoie des noires vapeurs de dépit, de vexation qu’y a soulevées l’artificieux discours de M. Favre ; il faut calmer ces soubresauts de haine et de colère qu’excite en notre âme cet empoisonneur public. Ce discours, je le sens dans mon cœur, c’est une préméditation d’assassinat, c’est l’égorgement de Paris qu’on achète.

La harangue entière de M. Favre n’est qu’un réquisitoire contre Paris : c’est la charge à fond du procureur général demandant une tête, celle de 2 millions d’hommes. De nos pauvres sœurs l’Alsace et la Lorraine, pas un mot, parce qu’il n’y a pas une seule pensée pour elles ; pas une parole de justice, d’équité, d’humanité n’est sortie de cette bouche, qui, semblable à celle du mauvais magicien de nos contes, vomit crapauds et vipères, crache des acides, et bave des flocons poisonneux. L’écume blanche, c’est le patelinage pour l’Allemagne, le rouge et le noir corrosifs, c’est le venin contre Paris. Ces pauvres Prussiens ont en effet durement aggravé les conditions du traité préliminaire, mais que vou-