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journal de la commune

rentrés à l’Hôtel de Ville, honnêtement, dignement, sans rancune, protestant de leur dévouement à la République et à la Commune.

Samedi 13 mai.

Le Journal Officiel de ce matin contient un décret, peu intéressant en apparence — affaires de fournitures et livraisons, — mais un décret qui sera marqué à l’encre rouge dans l’histoire du Travail et dans l’histoire de la Commune.

Article premier. — La Commission du Travail et d’Échange est autorisée à réviser les marchés conclus jusqu’à ce jour par la Commune.

Art. 2. — La Commission du Travail et d’Échange demande que les marchés soient directement adjugés aux corporations et que la préférence leur soit toujours accordée.

Art. 3. — Les conditions des cahiers des charges et les prix de soumission seront fixés par l’intendance, la Chambre syndicale de la corporation et une délégation de la Commission du Travail et d’Échange, le délégué et la Commission des Finances entendus.

Art. 4. — Les cahiers des charges pour toutes les fournitures à faire à l’administration communale, porteront dans les soumissions des dites fournitures, les prix minimum du travail à la journée ou à la façon accordés aux ouvriers ou ouvrières chargés du travail.

Ce décret avait été précédé par un Rapport dans lequel le ministre du Travail, Léo Frankel, avait détaillé de main de maître comment, dans le mois d’avril écoulé, des entrepreneurs, profitant de l’embarras extrême de la Commune, avaient imposé des conditions manifestement léonines qu’il s’agissait de réviser juridiquement. Les plus grosses des injustices n’étaient point celles des entrepreneurs contre la Commune, mais celles commises contre leurs ouvriers. Forcé de travailler à un prix absolument insuffisant, l’entrepreneur prélève son bénéfice sur les objets nécessaires à l’existence du travailleur qui, condamné à l’indigence, tombe alors à la charge de la charité publique et privée : il va tendre la main dans les bureaux de bienfaisance supportés par l’impôt. L’État n’a point le droit d’être complice