Page:Reclus - La Commune de Paris au jour le jour.djvu/291

Cette page a été validée par deux contributeurs.
281
journal de la commune

jamais mises en position au dire du Times. Les faits ? c’est Neuilly, c’est Passy, ce sont les Ternes et les Champs-Elysées, Issy, Vaugirard, Vanves en feu et en ruines. Les faits ? ce sont les blessés qui emplissent les ambulances, les cadavres dans les fossés. Si ces preuves ne suffisent pas à l’Assemblée, on lui en donnera d’autres ! »

Néanmoins, l’Assemblée a partagé le dépit du bourgeois gentilhomme, elle a montré sa vexation que son Général en chef, que le bourreau de Paris en expectative fût coupable de la faiblesse d’écouter ou de paraître écouter quelques paroles de conciliation et de laisser quelque petite porte entrebâillée à l’espérance.

Les délégués de l’Union des Syndicats protestent :

« Nous savions les risques que l’on court à intervenir entre les furies de la guerre civile… Entre deux forces qui luttent sans même vouloir se connaître, entre l’Assemblée et la Commune qui s’entre-répudient, nous avions pensé que l’intermédiaire naturel, le seul que l’une ni l’autre ne pussent désavouer, c’était la population parisienne… En attendant le jour où la violence fera place à la justice, nous acceptons tristement et fièrement la situation qui nous est faite, laissant l’injure à qui nous accuse, et nous bornant à affirmer sur notre honneur, qui n’a jamais failli, la scrupuleuse exactitude de notre rapport. »

Au moins, si le confortable Mortimer Ternaux, si gros, et de teint si fleuri, s’il allait, volontaire de l’ordre, accompagné de tous les engagés de l’Assemblée, prendre sa part des coups de bayonnette qui, nuit et jour, s’échangent dans les décombres de Neuilly, entre les soldats de la bourgeoisie et les champions du peuple !

L’Officiel de Versailles du 10 mai porte interdiction aux délégués des Conseils municipaux de se réunir à Bordeaux, car le Gouvernement, dit M. Thiers, trahirait l’Assemblée, la France et la civilisation s’il laissait se constituer, à côté du pouvoir régulier, issu du suffrage universel, les assises du Communisme et de la Rébellion !

Cela est écrit, cela est officiel, cela est un décret qui a maintenant force de loi. Celui-là qui veut s’interposer entre les belligérants est un rebelle, celui-là est un communiste, c’est-à-dire un débauché, un brigand, un fainéant, un pillard qui avise au moyen d’empêcher trois cent mille Fran-