Page:Reclus - La Commune de Paris au jour le jour.djvu/257

Cette page a été validée par deux contributeurs.
247
journal de la commune

invoque forcément le principe de décentralisation vis-à-vis des monarchistes ruraux, de l’autoritaire Thiers et des républicains unitaires de Versailles ; mais, à Paris, la Commune invoque forcément le principe de centralisation, tandis que chacune des municipalités, tirant à elle, se réclame de l’idée décentralisatrice. — Toujours est-il qu’à l’Hôtel Dieu, les sœurs de charité vont exercer leurs fonctions, non plus au nom de leur sœur supérieure, mais au nom du citoyen Treillard et, sur leur robe grise, elles vont coudre une ventrière rouge.

Le couvent de Picpus fut donc nettoyé autant que possible et à peu près déserté. Une quinzaine de jours après, on songea à faire des perquisitions dans l’établissement. Dans les grands bâtiments officiels, rien que d’orthodoxe, sauf, dans la chambre de la Supérieure, un Traité sur les avortements par le Père Bousquet, capucin. Mais, reléguée sous les arbres, les gardes nationaux trouvèrent une petite chapelle, et, au-dessous d’une statuette vêtue d’une robe bleue, avec l’inscription : Sainte Anne, priez pour nous, des instruments bizarres, ainsi décrits par le Mot d’Ordre.

… Deux sommiers étroits et déchirés long de 1 m. 50, couverts de crochets et courroies, une couronne de fer avec crochet par derrière, un carcan étroit avec tringle et poids, la dite tringle terminée par une fourche en fer, évidemment destinée à assujettir le menton. Un corset de fer rouillé, sans bourrelets, avec courroie en cuir, et deux tringles pouvant supporter les pieds d’une patiente ; le support est muni d’un ressort et d’un tourniquet auquel s’adapte une longue courroie ayant évidemment pour usage de rejoindre la fourche ou la couronne. À quoi les religieuses employaient-elles cet attirail qui rappelle ce que l’on a trouvé plus d’une fois dans des caves de l’Inquisition ?

Les partisans des bonnes sœurs Picpus répondent que ces engins ne peuvent être autre chose que des instruments orthopédiques. Tant mieux ! Mais en quoi les instruments orthopédiques diffèrent-ils des instruments de torture ? De plus fervents amis prétendent que ce sont là en effet des instruments de torture, mais que ces tortures n’étaient jamais infligées par l’autorité supérieure et que de loin en loin, seulement, quelque dévote plus altérée de pénitence obtenait de son Directeur l’autorisation de se bourreler un