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journal de la commune

municipalités, ils apportent une autre solution que celle de M. Dufaure aux questions des loyers et des échéances, ils ne se fient pas à la sincérité de M. Thiers, au républicanisme de l’Assemblée, cela suffit, ce sont des intolérants qui veulent tout savoir mieux que les autres. Qu’on leur réponde avec des obus ! » — « Mais, derrière les deux cent cinquante mille électeurs, il y a deux cent mille indifférents… un million de vieillards, de femmes, d’enfants… » — « Qu’importe ! faites pleuvoir les bombes sur cette fourmilière humaine ! Canonniers à vos pièces ! Avancez Galliffet, Ladmirault, Lavaucoupet ; ordonnez l’assaut, maréchal Mac Mahon ! »

C’est ainsi que raisonnent les économistes, professeurs, littérateurs, banquiers protestants, candidats à l’Institut, dans un journal qui a la réputation d’être modéré, d’être sage entre les sages, d’être instruit, d’être poli, et même d’être honnête. Ce serait grotesque et bouffon, si ce n’était sanglant et lugubre.

Toujours nous en revenons là. Un vent de haine, c’est à dire de folie, un sirocco de colère stupide a desséché nos cervelles et enflammé nos cœurs ardents comme un bloc de fer dans la fournaise. Nous nous étonnons à Paris des fureurs et des insanies de Versailles, Versailles s’étonne sans doute des fureurs et des insanies de Paris ; c’est à croire que nous nous débattons tous dans le délire de la fièvre, dans les rêves du cauchemar et tous les jours nous enfonçons plus bas.

Il est certain que, si le journal Le Temps se prononce contre Paris avec cette rigueur, avec cette cruauté, les bonnes gens de province, dont Le Temps est le mentor, perdront à sa suite ce qu’ils avaient de raison. « Puisque le Temps lui-même se déclare contre eux, puisqu’il n’admet pas la discussion avec les Communeux, il faut que ces Parisiens soient d’abominables scélérats, contre lesquels, nous aussi, nous serons inflexibles ! »

Nous avons à Paris de bien mauvais journaux et, de tous, le plus ignoble, parce qu’il veut l’être, est le Père Duchêne, une misérable contrefaçon de celui de 93. J’en ai pris les premiers numéros et, les tenant par les pincettes, les ai parcourus du regard. Peu de lignes qui ne soient émaillées d’un juron ou de deux ou trois mots obscènes qui reviennent