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journal de la commune

sérieusement parlé. Mais qui écoute aujourd’hui la voix de l’amour ou de la sagesse ? — On n’entend plus que le hurlement des canons !

« Citoyens, délégués du Conseil Municipal de Lyon, nous n’avons pu voir sans une profonde douleur se prolonger la lutte sanglante entre Paris et l’Assemblée de Versailles ».

Mercredi, 26 avril.

Malgré son complet insuccès pour obtenir de M. Thiers un terrain de conciliation entre Paris et l’Assemblée, la Ligue d’Union Républicaine n’a pas discontinué ses efforts pour faire accorder aux malheureux habitants de Neuilly un armistice de quelques heures au moins. Voilà vingt-deux jours qu’ils sont canonnés et bombardés, assaillis par une pluie de boîtes à mitraille ; de leurs maisons on a fait des redoutes, des retranchements et des barricades, on se canarde à travers leurs fenêtres ; dans leurs rues, nuit et jour, des hommes s’égorgent et s’éventrent à la baïonnette. Les femmes, les vieillards, les enfants ont été surpris par la guerre civile au milieu de leurs occupations quotidiennes ; réfugiés dans leurs caves pour la plupart, ils sont abasourdis par le fracas des obus qui renversent la maison sur leurs têtes. Ils vivent au milieu de ces assassinats, l’air qu’ils respirent est un air de charnier et d’abattoir ; parfois le sang ruisselle dans l’escalier obscur ; des familles entières ont péri par la famine : cependant il s’y tient une espèce de marché où l’on achète et vend quelques comestibles sous les bombes qui se croisent dans les airs, sous les boîtes qui éclatent en mitraille. Ceux qui ont vu tout cela de leurs yeux, à Paris, ne parleront plus qu’avec un sourire amer du progrès, des lumières, des conquêtes de la civilisation et des vingt siècles de perfectionnement de l’humanité par le christianisme.

Pendant une dizaine de jours, la Ligue a parlementé, la Commune ne lui a fait aucune difficulté, mais du côté de Versailles, on se heurtait à des impossibilités : — « Y pensez-vous ? Conclure un armistice ? Ce serait reconnaître aux pillards, aux brigands et aux assassins de Paris, le titre et la qualité de belligérants »… « aussi, nous ne