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journal de la commune

Mercredi, 26 avril.

Foule devant le théâtre du Châtelet. Ce sont les francs-maçons de Paris qui se réunissent en grande Assemblée pour délibérer sur la conduite que doit tenir leur vaste Association dans cette crise suprême. À mon grand regret, je me vois refuser l’entrée, je n’ai jamais été qu’un piètre apprenti ; depuis plusieurs années, je n’ai jamais remis les pieds dans une loge, il me serait impossible de reproduire exactement les signes d’usage. On dit qu’on va prendre dans cette séance des résolutions importantes, que des Frères enthousiastes me disent même devoir être décisives.

La franc-maçonnerie est nécessairement conciliatrice. Elle a des adeptes dans les deux camps. Aussi tous les hommes de paix ont immédiatement réclamé son intervention philanthropique et désintéressée. Mais la philanthropie est chose bien vague. Mac Mahon et M. de Galliffet riraient aux éclats si on les priait, au nom de la philanthropie, de ne plus ordonner de charges et de se tenir strictement sur la défensive. Quand on se bat, on se bat pour se battre, et sérieusement. Les combattants n’aiment point qu’on leur propose trêve ou armistice. Il ne s’agit pas seulement de prêcher la paix et la concorde, il faut encore formuler les articles du traité de paix, il faut un programme de conciliation.

De même que tous les conciliateurs qui sont survenus, Ligues, Unions, Syndicats, la Franc-Maçonnerie propose des réélections sur toute la ligne, précédées de la reconnaissance des franchises municipales.

Rien de plus juste et de plus raisonnable que ces propositions. Si l’Assemblée de Versailles n’était furieuse et insensée, elle les eût admises immédiatement. Mais tous les jours on les lui présente à nouveau et elle les refuse à nouveau. En intervenant, la Franc-Maçonnerie n’accomplit que son devoir d’humanité ; mais en intervenant dans un débat politique, elle discute nécessairement la politique et doit aboutir fatalement à prendre parti : de sorte qu’en accomplissant son devoir, elle ne pourra échapper au reproche d’être sortie des bornes de son devoir.

Déjà, dans les premiers jours du mois, les loges de Paris