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journal de la commune

Avant tout, on les dépouillait de leur képi, s’ils avaient pu le conserver, et même de leurs vareuses ou redingotes, on les mettait en manches de chemises, afin que, cessant d’être costumés comme d’honnêtes gens, guenilleux et loqueteux, les chiens aboyassent à leur passage, et les bons bourgeois de province les regardassent avec un mépris mélangé d’exécration. Car la morale est entrée au pouvoir, en la personne de M. Jules Simon, les questions de sentiment ont leur représentant, M. Favre ; ils sont tous théistes spiritualistes au gouvernement et pratiquent le moment symbolique à l’instar de M. de Bismark.

Le Gaulois, journal des honnêtes gens, raconte ainsi le départ d’un convoi de prisonniers :

Jeudi soir, 6 avril.

… Un grand nombre de curieux assistait sur la Place d’armes au départ des prisonniers internés dans la caserne d’artillerie.

Ces prisonniers quittaient Versailles en même temps que ceux du camp de Satory. Ils étaient 1 400 environ. Ils ont été divisés en quatre détachements, qui sont partis de leur prison à neuf heures, à dix heures, à onze heures et à minuit.

Ils étaient enchaînés par cinq. Ils ne portaient pas de coiffures, mais ils avaient tous la tête enveloppée d’un mouchoir.

Ils sont escortés par 450 gardiens de la paix mobilisés, à chacun desquels on a distribué hier sur la place d’Armes, un revolver à six coups.

Ces gardiens vont être remplacés par ceux de leurs camarades qui sont parvenus à s’enfuir de Paris, et qui recevront un uniforme et des armes.

En tête du premier envoi de prisonniers marchaient les trois cantinières capturées.

L’une d’elle avait été médaillée à l’affaire de Châtillon, — du temps des Prussiens ; — mais le jour où elle a été amenée prisonnière, une femme de Versailles, indignée, lui a arraché sa médaille.

La somme totale d’argent recueillie sur ces prisonniers s’élève, paraît-il à trois cent mille et quelques centaines de