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journal de la commune

capables d’accepter une transaction pareille. Tout fait penser que s’il a proposé lui-même une entrevue avec les représentants de la Ligue, c’est pour rédiger la circulaire dont, sitôt après l’entrevue, il a inondé la Province. Il y raconte qu’il a consenti à recevoir non pas des envoyés de la Commune, qu’il n’eût jamais daigné écouter, mais quelques républicains sincères qui venaient implorer le maintien de la République et la clémence du vainqueur ; M. Thiers ayant en effet promis que les insurgés qui déposeraient les armes auraient la vie sauve.

Ainsi 50 à 60 000 hommes avec 5 ou 600 canons, qui, depuis un mois tantôt, tiennent en échec « la plus belle armée du monde » ne sont pas même des belligérants ! Puisque Versailles ne veut pas traiter, Paris ne peut pas traiter. Et ce qui nous répugne le plus dans ces prétendues négociations, c’est la mauvaise foi de M. Thiers. Que Paris se défendre à outrance, c’est ce qu’il a de mieux à faire. Mieux vaut pour Paris être la victime du droit que la dupe bernée par un gouailleur ignoble et sinistre !

Samedi, 15 avril

Il est bien certain que, quoi qu’y fassent Mac Mahon, le vainqueur de Magenta, le vaincu de Sedan, et M. Adolphe Thiers, le plus habile général du siècle, notre situation militaire s’est rétablie. Le furieux assaut dans la nuit du 11 au 12, pour lequel le camp de Satory avait été levé et où a donné à peu près toute l’armée, a été pour les Versaillais funeste autant que l’a été pour nous la triple expédition de Chatillon, du Mont Valérien et de Chatou. Il est certain que chaque armée est presqu’inexpugnable dans son propre terrain. Nous sommes enchantés du jeune et vaillant Dombrowsky : ses hommes se feraient tous tuer avec lui. Il s’est solidement retranché dans Asnières, et de là il pousse des pointes sur Colombes et lieux avoisinants. Depuis ce mouvement, les Versaillais, loin de faire aucun progrès au delà de Neuilly, se sont vu enlever la moitié de ce faubourg de Paris ; mais ils s’y étaient tout de suite fortement barricadés, on ne leur reprend les rues que maison par maison, les maisons que pierre à pierre, car on se bat des deux côtés, jour et nuit, avec un acharnement terrible, ce sont des combats corps à corps de tigre à