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l’homme et la terre. — rome

plus grave : il fallait payer la rançon, la renouveler même chaque année, puisque chaque année le fleuve gonflait ses eaux irritées. Les pontifes ou « constructeurs de ponts » ordonnaient donc aux jeunes

Cl. Alinari.
balance romaine
filles pures, à ces gardiennes du feu qu’on devait un jour appeler des
« vestales », de saisir les vieillards sexagénaires et de les lancer du haut du pont afin de calmer ainsi l’ire du dieu redouté.
Dans une région du Hanovre, sur les bords de l’Elbe, où résidaient autrefois les Wendes, de race slavonne, un dicton bas-allemand s’est conservé jusqu’à nos jours, rappelant au peuple que l’on faisait autrefois des sacrifices humains de même nature : « Coulez bas, coulez bas, le monde ne veut plus de vous »[1]. Quel qu’ait été le passé préhistorique des Romains, il est certain que, dans leur période d’enfance comme nation puissamment constituée, ils furent engagés en d’incessantes luttes avec leurs voisins. Ainsi se développa chez eux cet atavisme de fureur guerrière qui les domina pendant les premiers siècles de leur existence. D’ailleurs l’état politique et social dans lequel se trouvaient les populations diverses de la contrée, tantôt ennemies, tantôt alliées suivant les intérêts particuliers, les passions du moment et les hasards des conflits, ne permettait pas au peuple naissant un

autre genre de vie. Le voisinage de Rome avec tant

  1. R. von Ihering, ouvr. cité, p. 404.