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l’homme et la terre. — grèce

seulement l’île est très allongée, ce qui facilite la segmentation des habitants en groupes distincts sans cohésion forcée, mais les massifs de montagnes sont disposés de telle sorte, au centre et aux deux extrémités, que l’île se trouve réellement divisée en trois domaines naturels sans rapports les uns avec les autres.

Ce fut toujours par l’emploi de la violence, contrairement aux affinités spontanées, que la domination ayant son siège au milieu de la
Cl. Monatshefte, Berlin.
hagia triada, peintures à fresque,
plantes et animaux
Crète, dans les campagnes que domine le mont Ida, berceau de Jupiter, put s’étendre sur les montagnards de l’est et de l’ouest. Par la distribution normale des habitants en groupes disposés linéairement en des vallées de difficile accès, la Crète devait naturellement se diviser en de nombreuses petites républiques, assez fortes pour se défendre chacune contre sa voisine, trop faibles pour résister à une grande invasion. L’île ne présente point d’unité ; se composant de nombreuses individualités ethniques en lutte les unes avec les autres, elle devint une proie facile pour des envahisseurs étrangers ; sa liberté date des temps du mythe et de la tradition, mais pendant les temps historiques, elle fut toujours asservie.

Les Phéniciens furent au nombre de ses dominateurs : ils s’emparèrent de la Crète comme de Santorin et de tant d’autres îles de la Méditerranée. La preuve en est dans le culte du Minotaure, que l’on doit identifier avec le Moloch phénicien, le monstre à tête de bœuf, dont les bras se resserraient sur des victimes humaines. Ce culte dura longtemps, puisqu’il se maintint jusqu’aux temps où les immigrants