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l’homme et la terre. — égypte

voit reparaître dans l’histoire comme étant à la veille de se changer en réalité. Ce qui est vrai, c’est que l’emploi judicieux des eaux de tout le haut Nil et de ses affluents dans les campagnes riveraines aurait certainement pour résultat d’appauvrir ou même de supprimer les crues et de ruiner complètement la basse Égypte[1].

Entre les deux rivières composantes du Nil, le fleuve Blanc et le fleuve Bleu, s’opère une division du travail, qui fonctionne avec une étonnante régularité.

Cl. Al. Vista.

palmeraie en temps de crue du nil


Le cours d’eau majeur, dont le débit est mesuré par les grands lacs équatoriaux et par des marais encombrés d’îles flottantes, forme le flot constant qui se maintient en toute saison, même pendant les longues sécheresses, grâce à l’escalier de rapides et de « cataractes » qui règle le mouvement du flot et transforme le Nil en un véritable canal aux biefs étages. Quant au Nil Bleu, notablement moindre en temps de sécheresse que le fleuve Blanc, il roule pendant la saison des pluies une masse liquide beaucoup plus considérable : en grande crue, il représente même un débit deux fois plus fort que la portée moyenne du bas Nil à ses embouchures. C’est l’excédent des pluies éthiopiennes qui se déverse par le Nil Bleu dans la Nubie et dans l’Égypte, et grâce auquel a pu se développer la merveilleuse agriculture de la basse vallée. A la première et grande crue fluviale causée par le Nil Bleu, l’Atbâra vient en ajouter une seconde, formant, d’après le langage des riverains, une « corne » dans le profil régulier de l’inondation. En vertu du contraste que présentent les

  1. Scott Moncrieff, Royal Institution.