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l’homme et la terre. — potamie

en parlant des rois d’Elam, j’imposai l’inquiétude à leur ombre et les privai de libations ». Les rois vaincus, enfermés à Ninive en des cages de fer, étaient condamnés à briser et à réduire en poussière les squelettes de leurs ancêtres pour amuser les badauds.

On se demande s’il ne faut pas attribuer à l’habitude de verser le sang, de torturer et de tuer, la supériorité incontestable des artistes assyriens dans la représentation des hommes et des animaux mourants : le chef-d’œuvre de l’art ninivite est la lionne blessée qui se défend encore de la gueule et des pattes antérieures, tandis que l’arrière-train, déjà paralysé, traîne raidi sur le sol.

Bas-relief de Kujundcbik.

la lionne blessée

Le « Repaire des Lions » fut rendu à la solitude sans que l’histoire précise les détails de sa ruine, soit à l’époque d’une invasion des Scythes, soit peu après, par une victoire des Mèdes, il y a 2 500 ans. Presque aussitôt elle fut oubliée : Xénophon, passant deux cents années plus tard dans le voisinage des ruines, ne cite même pas le nom de Ninive, il parle pourtant des villes Larissa, Mespila, ayant surgi au milieu des restes grandioses de remparts et de pyramides[1]. On

  1. Retraite des Dix Mille, liv. III, chap. iv.