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l’homme et la terre. — iranie

phique, poèmes, mythes et récits. Mais il est très probable que la part de ces aïeux dans notre savoir actuel dépasse de beaucoup la connaissance que nous en avons.

Nous leur serions redevables des premiers procédés qui permirent l’élaboration des mathématiques. C’est chez les Iraniens, à en juger par la proche parenté des termes désignant les unités, les dizaines et les centaines, qu’aurait été introduit le système de numération qui, se dégageant complètement de l’emploi des métaphores et des synonymes, fixa définitivement, pour chaque nombre, des termes à sens déterminé. Ce fut là une des plus importantes révolutions de l’histoire humaine. Cette série des chiffres primitifs s’arrêtait inclusivement aux centaines, car les noms de « mille » diffèrent dans les dialectes indo-européens[1] ; néanmoins, elle contenait en germe la théorie du système de numération sans lequel on ne saurait concevoir le développement scientifique du monde moderne.

Enfin, on peut se demander si les Perses n’avaient pas déjà trouvé l’art de représenter la Terre sous forme de boule. Qu’était cette coupe merveilleuse que consulte Cyrus et sur laquelle étaient gravés les contours des sept parties du monde ? Peut-on y voir autre chose qu’un essai de figuration du globe ?

Les cultes primitifs, qui se mélangèrent avec d’autres éléments pour constituer plus tard le mazdéisme et valurent aux régions de l’Iranie le nom de « contrées pures », paraissent avoir été celui du labour, qui fait collaborer l’Homme avec la Terre, et celui de la flamme purifiante ; cette double adoration resta longtemps enfermée dans le cercle étroit des familles, sans la redoutable intervention d’une caste sacerdotale.

Certes, le culte du Feu est de tous le plus simple, le plus normal, le plus facile à comprendre et à justifier scientifiquement. Dès que l’homme, arraché à la terreur primitive, commença de réfléchir sur les effets et sur les causes dans l’immense univers qui l’entoure, ne dut-il pas trouver naturel d’adorer le grand astre d’où, pour la Terre et ses habitants, se déverse toute vie ? Avant l’aube, il fait froid, tout est triste, l’homme reste inquiet des songes de

  1. Max Müller, Essais de Mythologie comparée, trad. G. Perrot, pp. 65, 67.