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l’homme et la terre. — iranie

sion où coule le fleuve Helmend et où dorment les lacs salés du Seïstan, d’autres régions montueuses sont également habitées par des tribus sédentaires, que protègent, comme les murs d’une citadelle, les âpres rochers de leur enceinte. Mais là s’arrête la ressemblance des milieux. D’abord ces massifs sont notablement moins élevés en moyenne que les monts détachés du formidable rempart de l’Hindu-kuch et, par suite de leur orientation, offrent beaucoup moins de retraites favorables. Puis, situés sous un climat différent, très sec, aux pluies irrégulières et rarement suffisantes, ces monts ne laissent pas germer de végétation assez abondante pour que les habitants de la contrée puissent compter sur des récoltes annuelles et souvent le manque de ressources les force à l’immigration partielle ou collective, pacifique ou guerrière. D’autre part, l’attaque de leurs réduits est facilitée par l’existence de nombreuses plaines intermédiaires se ramifiant en larges allées à travers tout le territoire de l’ancien Kadru, « le pays des Bruns », ainsi nommé de la couleur de ses habitants, les Brahni, les « Ethiopiens » d’Hérodote[1]. Les Grecs ont changé le nom de Kadru en celui de Gédrosie : c’est le Balutchistan actuel.

Naturellement les riverains de la mer des Indes et du golfe Persique devaient chercher à établir un trafic régulier et des communications fréquentes le long du littoral. Cette voie, l’histoire nous le dit, fut en effet pratiquée, non seulement par de faibles caravanes, mais aussi par des armées : toutefois le manque d’eau dans les ouadi de la côte, le petit nombre des habitants, les dangers de la soif et de la faim ont souvent éloigné les marchands et les guerriers de cette route naturelle qui d’ailleurs ne présente pas d’obstacles matériels ; ce ne sont pas les rochers, mais les sables arides qui ont fait de la Gédrosie une région de souffrance et d’effroi pour les voyageurs. Les incursions de pillards, apparaissant soudain comme des volées de corbeaux, sont également à craindre en ce pays brûlé.

De tout temps la route maritime, des ports voisins de l’Indus à ceux du golfe Persique, fut plus fréquentée que la route de terre et les quelques villes qui se montrent de distance en distance sur la côte doivent surtout aux visites des navires de cabotage leur importance relative et leur population.

  1. Hermann Brunnhofer, Urgeschichte der Aryer in Vorder-und Central-Asien, Erster Band, p. 109.