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fleuves et navigateurs

lequel il suffit de se baisser, se fit en mille endroits de la terre, et peu à peu l’homme apprit à le répéter, non seulement au bord des eaux, courantes, mais aussi sur les berges et dans les clairières. On peut encore, çà et là, voir ces humbles commencements de l’agriculture se renouveler de nos jours, sur les plages émergées des grands fleuves américains.

canot en écorce de bouleau sur les rapides de l’amerique du nord

Dessin de George Roux d’après une photographie.

Que ne devons-nous donc pas aux eaux courantes, à tous ces dieux topiques ! Ils nous ont arrachés à l’inertie primitive, nous ont invités au mouvement, nous ont transformés en une humanité progressive, se renouvelant sans cesse, nous ont enseigné les mille industries diverses par le rapprochement avec les autres hommes, et, finalement, ont contribué à nous donner le pain. Nous sommes ainsi attachés aux fleuves par la mémoire consciente ou inconsciente d’événements innombrables ; nous savons que leurs vallées furent les voies historiques des peuples en marche, et que la vie des nations s’est développée sur leurs rives.

Les grandes civilisations, desquelles nous sommes issus, et dont dérive l’humanité dans le sens moderne du mot, n’auraient pas vécu s’il n’y avait pas eu de fleuve Jaune, de fleuve Bleu, pas de Sindh ni de Gangâ, pas d’Euphratc ni de fleuve d’Egypte, pas de Sénégal ni de