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l’homme et la terre. — l’angleterre et son cortège.

de Travancore se disent être devenus brahmanes en passant par le ventre d’or d’une vache magicienne. Les Haïtiens, chez lesquels noirs et sang-mêlés constituent deux castes ennemies, expriment la même idée par un fin proverbe de forme naïve : « Nèg riche li milate ; milate pauv, li nèg ». Soit, en français : « Le
Cl. du Globus.
lama du sikkim
nègre riche est dit homme de couleur, le mulâtre pauvre est appelé vilain nègre ».

Dans le monde infini des castes, entre les « dieux sur la Terre » et les immondes Tchandala, mainte stratification se dépose d’une manière incertaine et flottante, pour ainsi dire, par suite du va-et-vient constant de l’évolution économique. Des castes périssent, emportées par un changement politique, une révolution commerciale ; d’autres surgissent, suscitées par un nouveau milieu : telle la caste des palefreniers ou « cavalères », qui naquit après l’arrivée des Portugais à Ceylan. Le régime britannique, accompagné de nouvelles industries qui supplantent des professions anciennes, a eu pour conséquence en maints endroits toute une nouvelle hiérarchie de classes. Les castes de vagabonds existent encore, de même que celles des voleurs, mais celles des assassins, comme l’étaient autrefois les Thug, paraissent avoir été exterminées, à moins qu’il n’en subsiste quelques restes, des cérémonies symboliques ayant pris la place des actes sanglants. Parmi les tribus les plus curieuses, il en était une, sur la côte de Malabar, que le voyageur