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école d’obéissance

et que leur éducation doit correspondre non à la volonté du père, ni aux exigences de l’Eglise ou de l’Etat, mais aux nécessités et aux convenances de leur développement personnel. Faibles, petits, les jeunes sont d’autant plus sacrés pour les grands qui les aiment et les protègent. Les écoles, bien rares encore, où ce principe de la pédagogie est strictement pratiqué sont des lieux de joyeuse et fructueuse étude, grâce à cette « extrême révérence » à laquelle l’enfant a droit de la part de ses professeurs. Hélas ! en pensant à ce qu’étaient les écoles où furent torturés la plupart des hommes de notre génération, quel est celui d’entre nous
Cl. de Zlatâ Pvaha
école de garçons en tunisie
qui ne répéterait la parole de saint Augustin : « Plutôt la mort que le retour à l’école de notre enfance ! »

A chaque phase de la société, correspond une conception particulière de l’éducation, conforme aux intérêts de la classe dominante. Les civilisations anciennes furent monarchiques ou théocratiques et la survivance s’en prolonge dans les écoles, car, tandis que dans la vie active du dehors les hommes se dégagent des oppressions antiques, les enfants, relativement sacrifiés, comme les femmes, en raison de leur faiblesse, ont à subir plus longtemps la routine des pratiques d’autrefois. Le type de nos manuels d’éducation existe depuis plusieurs milliers d’années, et l’on répète encore presque dans les mêmes termes les préceptes « moralisateurs » qui s’y trouvent. « Obéir ! » telle est, au fond, la seule morale prêchée dans un livre du prince Phtah-Hotep, qui fut rédigé, peut-être même seulement transcrit, à la fin de la cinquième dynastie — c’est-à-dire il y a cinquante et un siècles —, et que conserve la bibliothèque nationale de Paris. Obéir afin d’être récompensé par une longue vie et par la bienveillance des maîtres, c’est là toute la sagesse. Le prince auteur se donne lui-même en exemple : « Je suis devenu ainsi un ancien