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fonctionnarisme

au lieu le plus menacé qu’un isthme moindre de cent mètres en largeur : le cordon de dunes qui forme l’ossature de l’île y est très faible, et tout fait prévoir que, lors d’une forte marée d’équinoxe, quelque furieux vent d’ouest poussera un jour les vagues à travers le pédoncule de sable et s’ouvrira un large détroit par les marais et les champs. Tous sont d’accord qu’il serait urgent de construire une puissante digue sur ce point faible de l’île ; mais on y avait jadis construit un fortin, ouvrage sans valeur, abandonné maintenant aux chauves-souris, n’ayant pas même un homme de garnison ; n’importe, il est sous la surveillance virtuelle du génie et, par conséquent, tous les travaux civils sont forcément arrêtés dans son voisinage : cette partie de l’île doit périr.

Cl. R. B., à Paris.

la côte de l’île de ré au voisinage de la pointe des baleines et des marais perdus


Non loin de là, les eaux d’un golfe ont fait irruption en des marais salants et les ont changés en un estuaire sans profondeur. Il serait facile de récupérer ces « Marais Perdus » et les riverains en avaient formé le projet, mais l’invasion de la mer en a fait un domaine national et la série des formalités qu’entraînerait la reprise du sol apparaît tellement indéfinie que l’entreprise en est devenue impossible. La terre perdue restera telle, à moins d’une révolution qui supprime toute intervention fâcheuse d’un État ignare et indifférent et remette aux intéressés eux-mêmes la libre gérance de leurs intérêts.