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l’homme et la terre. — le nouveau monde et l’océanie

l’axe est le chemin de fer, non encore complètement achevé (1905), de Buenos-Aires à Valparaiso : c’est exactement la partie de la contrée qui ressemble le plus à l’Europe et où il a été, par conséquent, le plus facile d’en constituer une nouvelle, avec les caractères spéciaux que chaque pays présente. Peu à peu le commerce de ces régions s’universalise, embrassant graduellement tous les objets que l’homme peut utiliser ; mais diverses ressources particulières leur assureront encore pendant longtemps un rôle à part dans les échanges du monde. Pays de vastes plaines, les provinces de la pampa ont leurs céréales et produits agricoles de toute nature ; le Chili dispose de ses précieux trésors miniers, cuivre, houille, salpêtre, borax ; le Pérou et la Bolivie continuent d’être, comme au temps de la domination espagnole, d’immenses réservoirs de riches métaux ; le Brésil l’emporte dans le mouvement des denrées par le caoutchouc des forêts amazoniennes et par le café des provinces littorales, surtout de Sâo Paulo, aux « terres rouges » inépuisables. Déjà, par ses côtes les plus rapprochées du continent africain, le Brésil a quelques relations directes avec la Guinée d’où lui vinrent jadis la plupart de ses habitants noirs ; dans un avenir peut-être prochain c’est par les mêmes côtes, entre lesquelles l’Atlantique se rétrécit aux dimensions d’un bras de mer traversable en trois jours, c’est par cette même voie que les chemins de fer tracés à travers la Maurétanie, le Sahara et la haute Nigérie apporteront les voyageurs et les marchandises venus directement du bassin de la Méditerranée. Des routes très rapides, dont la construction ne semble pas encore occuper suffisamment les hommes d’entreprises, ne manqueront pas de s’établir ainsi vers le continent méridional du Nouveau Monde. Pernambuco ne sera pas plus éloigné de Paris que New-York l’est aujourd’hui. Quant aux îlots parsemés dans l’immensité du Pacifique, ils resteront séparés par d’énormes étendues, encore longues à franchir, de la côte qui marque le pied des Andes. C’est là que se trouve le plus large écart entre les zones d’habitation humaine. Cependant le Chili a fait déjà mainmise sur ces espaces océaniques en prenant les terres de Juan Fernandez et la fameuse île de Pâques, aux mystérieuses effigies qui nous parlent d’une civilisation disparue.

A l’ouest du monde océanien, toutes les grandes terres qui dépendent géographiquement du continent d’Asie sont déjà entrées par la conquête, par l’utilisation agricole et commerciale, même par la coloni-