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esclavage déguisé

trouvera également quelque ingénieuse formule légale pour enlever le droit de vote aux malheureux nigger. En certains États, et notamment en Floride, on tourne très habilement toutes les difficultés en faisant condamner, pour contraventions diverses, les nègres valides dont on a besoin ; puis les directeurs de la prison les prêtent aux entrepreneurs pour le travail forcé. C’est l’État qui paie et les capitalistes y trouvent le double avantage d’accroître leurs bénéfices et de rompre la force des associations ouvrières composées de blancs.

Cl. du Globus.

quelques « messieurs de couleur »
De gauche à droite, un journaliste, un médecin, un peintre.

Mais la haine pure, brutale, instinctive se manifeste aussi en maints endroits, partout où des nègres se sont rendus coupables de quelque délit, où quelque accusation non prouvée, quelque soupçon pèse sur eux. Telle ville les expulse en masse et leur interdit de se présenter jamais sur le territoire ; en d’autres lieux, on met le feu à leur quartier ou bien à la prison dans laquelle ils sont enfermés et on rejette les fuyards dans le foyer de l’incendie. Partout on prend la précaution d’empêcher que les gens de la caste méprisée puissent souiller de leur contact les nobles fils de Japhet, dans les omnibus, les trains, les théâtres, les écoles, les églises. Enfin, dans les cas graves, surtout dans les affaires de mœurs, des pratiques horribles de torture sont devenues tellement communes qu’on peut les considérer comme faisant désormais partie de la législation locale. Le nègre coupable ou réputé tel est écorché vif, découpé, disséqué partiellement, brûlé à petit feu, ou fusillé en détail ; on s’ingénie à le faire souffrir, comme par un obscur atavisme iroquois ; puis, quand la victime est achevée, coupée en petits morceaux, réduite