Page:Reclus - L'Homme et la Terre, tome V, Librairie universelle, 1905.djvu/513

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
507
pénétration russe dans l’empire chinois

autres Russes, dans les régions de l’intérieur. Dans ce mouvement général d’invasion, l’action des Slaves est de beaucoup la plus importante, car les Européens qui s’établissent dans les régions côtières ne s’y fixent guère à résidence définitive : ils ne s’y trouvent pour la plupart qu’en étrangers et sans famille, tandis que les Russes, venus par la Sibérie, se fixent d’ordinaire sur le sol
socialistes russes condamnés aux travaux forcés
et y font souche en se mélangeant aux populations indigènes, qu’ils s’assimilent graduellement. Le territoire des Jaunes est ainsi définitivement envahi et devient part intégrante de l’aire de civilisation européenne. Or, si arriérés que soient, en majorité, les colons slaves de l’Asie, il n’en est pas moins vrai que, dans l’ensemble, ils portent avec eux la pensée européenne, c’est-à-dire le progrès, le philonéisme, et l’emportent en valeur virtuelle sur la culture chinoise, misonéiste, tournée vers le passé. Le changement d’équilibre a été complet pendant ces deux mille années.

Toute la partie septentrionale du continent, la Sibérie, est déjà une « Russie d’Asie », malgré le gouvernement lui-même qui s’ingéniait depuis l’époque d’Ivan le Terrible à faire de ce territoire un simple domaine d’Etat sans libres relations avec les provinces européennes. Le commerce était strictement monopolisé, l’immigration n’était tolérée