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l’homme et la terre. — russes et asiatiques

disparu : ils sont tous morts ou dispersés. La race a cessé d’exister[1]. Après cet horrible dépeuplement du Caucase occidental, nettoyé de ses Tcherkesses, Abkhazes et Adighé, il paraissait indispensable que la Russie tâchât de faire disparaître aussitôt que possible les traces de son œuvre mauvaise, en faisant rentrer la vie dans les demeures abandonnées, en remettant à d’autres mains de laboureurs le manche de la charrue.

légende de la carte 511.
Slaves : 1, Grands Russiens ; 2, Petits Russiens ; 3, quelques Bulgares disséminés.
Caucasiens : 4, Géorgiens et Lazes ; 5, Adighé ; 6, Kabardes ; 7, Abkhazes ; 9, Tchetchènes ; 10, Avares ; 11, autres Lezghiens ; 12, Koubatchi.
Turcs et Tartares : 13, Tartares ; 14, Nogaï ; 15, Kirghiz ; 16, Koumik ; 17, Turcs proprement dits.
Aryens : 8, Osses ; 18, Arméniens ; 19, Tates et Taliches ; 20, Kurdes ; 21, Grecs ; 22, Allemands.
Mongols : 23, Kalmouk.

En T. se trouve l’ancien centre des Tcherkesses ; en D., celui des Dukhobortzi, avant leur émigration.


Mais le gouvernement russe ne fit point appel aux habitants des contrées voisines, Arméniens, Grousiens ou Lazes, qui eussent pu vivre d’un genre de vie analogue à celui des Abkhazes ; désireux de russifier complètement le pays, il offrit des terres à des colons de la Petite Russie, mais sans leur fournir des avantages qui pussent compenser le changement absolu de milieu : les fils de la steppe ne s’accoutumèrent point aux roches abruptes, aux gorges profondes de la montagne. D’ailleurs, pour les attirer et les retenir, il eut fallu construire des routes, établir des entrepôts et des marchés et, par-dessus tout, laisser aux colons leur libre choix des terres et des cultures ; en un mot, il eut fallu que l’administration fonctionnât en sens inverse de sa nature. Toutefois, on ne manqua point de projeter de très grandes œuvres en vue du peuplement de l’ancienne Abkhasie et du territoire des Adighé ; mais les plans furent oubliés, ou bien entamés d’une manière incohérente

  1. Eugène Pittard, Dans la Dobrodja, p. 103.